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Entretien : Parcours d’un passionné d’histoire militaire et collectionneur de la Grande Guerre

Entretien avec Bastien Cleenewerck, collectionneur de matériel des conflits contemporains (objets locaux ou issus de combattants issus de la région Hauts-de-France), assistant documentaire chargé de la régie des collections à la Coupole de Saint-Omer et ancien étudiant du Master Patrimoine et Musées (promo 2020-2021)

Article de Lillomusées

- Bonjour, peux-tu te présenter, stp ?

- Je suis Bastien Cleenewerck, j’ai 27 ans. Je vis à Bailleul, dans le 59, et je travaille sur Saint-Omer à La Coupole, Centre d’Histoire et de Mémoire/Planétarium 3D La Coupole. Je suis passionné d’histoire, et plus précisément de l’histoire locale. Je suis également passionné de matériel militaire depuis très jeune.

J'ai souvent visité des musées dans mon enfance, y compris des musées privés chez des collectionneurs, ce qui a nourri mon goût pour les collections. Je participais également à des brocantes avec mon père, passionné de longue date. Enfant, je recherchais surtout des Playmobil, non pas pour jouer, mais pour créer des mises en scène, presque comme un collectionneur.

À partir de 12-13 ans, mes proches ont commencé à m'offrir du matériel militaire, que j’ajoutais progressivement à ma chambre. C’est lors d'une brocante avec mon père que j'ai trouvé des objets marquants, lançant véritablement ma collection. Mon objectif était de remplir plusieurs étages de vitrine, et l'intérêt s'est vite transformé en passion.

Sans les moyens pour financer ces acquisitions, je me suis énormément documenté et renseigné sur le domaine du militaria, puis j’ai acquis des pièces au fur et à mesure. Quand je suis arrivé au lycée, j’ai continué cette collection et d’agrandir ma collection, les week-ends, j’étais en brocante.

Dès que j’ai eu l’âge de travailler, j’ai trouvé des emplois et fait le plus d’heures possibles pour pouvoir investir tout cet argent gagné dans ma collection. Ça a commencé par de petits boulots ; par exemple, j’ai été éboueur, j’ai fait beaucoup d’intérims. J’ai eu des emplois étudiant qui m’ont permis de financer en plus de ma collection, mes études. Certains objets que j’achetais, je les revendais, ça m’a permis de découvrir ce métier d’achat-revente. Une fois que j’ai été plus âgé et que j’ai vraiment eu un salaire, j’ai pu me consacrer à fond à cette activité. Le fait que mon père collectionne également des objets a été un avantage, car il m’a apporté des connaissances précieuses dans le domaine.

 

- Quel a été ton parcours ?

- J’ai fait, après un Baccalauréat en Sciences Économiques et Sociales, une Licence d’Histoire, en suivant le cursus normal, sauf que je voulais partir dans l’enseignement : j’ai donc fait une Licence 3, parcours Enseignement. Je me suis vite rendu compte, lorsque j’ai commencé mon Master Métiers de l’Enseignement, de l’Éducation et de la Formation que ça ne m’intéressait pas. J’ai donc fait une pause dans mes études et je suis allé travailler à l’usine pendant quelque temps, pour me payer mes pièces de collection.  

Après, j’ai décidé de partir en Master Histoire de l’Art, Parcours Patrimoine et Musées. J’ai fait deux ans de Master Patrimoine et Musées à l’Université de Lille, et ensuite j’ai été diplômé. J’ai fait mes études pendant le Covid et mon master en plein Covid, ça a été compliqué étant donné que la première année mes stages ont été annulés et durant la deuxième année ça a été plus compliqué de trouver un stage. J’ai obtenu un stage à La Coupole, un stage rémunéré, et j’ai également fait en bénévolat une exposition pour une commune à côté de Saint-Omer. Ce qui m’a permis de vraiment mettre un pied dans le métier.

Cette exposition que je devais réaliser, je pouvais la faire sous forme de convention de stage, mais La Coupole a décidé de me prendre en stage de longue durée ce qui était plus intéressant. Pour cette exposition, j’ai exposé ma collection sur l’armée britannique, l’objectif était de présenter les différentes facettes de Saint-Omer pendant la Grande Guerre, en y mettant en avant les divertissements des soldats britanniques. Je devais la réaliser pour les Journées Européennes du Patrimoine (JEP), c’était d’ailleurs la première fois que la commune organisait quelque chose pour les JEP. Ce qui m’a été bénéfique, c’est que j’ai vraiment eu le projet de la conception, à l’élaboration, à vraiment l’ensemble des métiers, des sous-métiers autour du projet d’organisation d’une exposition, j’ai dû tous les faire pour mener à bien le projet. Ça a été de la demande de prêts de vitrines, jusqu’à l’exposition, donc de la muséographie, après de la communication, et l’ensemble s’est très bien passé.

 

- En quoi consiste tes activités professionnelles aujourd’hui ?

- J’ai commencé à La Coupole en tant qu’agent d’accueil et régisseur des collections d’objets. Mes missions à La Coupole pour le poste d’agent d’accueil étaient d’accueillir le public, faire des ateliers pédagogiques et des visites guidées, d’accompagner le visiteur et de surveiller. Concernant la régie des collections, j’ai été missionné sur Micromusée,l’objectif de Micromusée, c’est un inventaire en ligne partagé avec d’autres structures. Le but était de dresser un inventaire complet des collections de La Coupole, mais également de réfléchir à des axes futurs pour la prochaine muséographie (comme de potentielles acquisitions, par ex.).

Maintenant, je suis Assistant documentaire chargé de la régie des collections. Pour les missions, je fais donc de la régie des collections, inventaire, écriture de contenus, réalisation d’exposition et recherche historique. En parallèle je continue les ateliers pédagogiques et les visites guidées. 

A côté de ses deux professions, je suis également autoentrepreneur comme brocanteur en brocantes et antiquités militaires. L’objectif de cette activité consiste en de l’achat et de la revente. J’achète des objets de collections et les revends sur Internet et l’objectif est de faire grossir ma propre collection, pour un jour je l’espère pouvoir ouvrir un musée. Dans l’autoentreprise ce qui est complexe, c’est « qu’il faut tout faire soi-même », car il n’y a que très peu d’accompagnement.

Ce qui est bien avec mes deux activités, c’est qu’elles sont complémentaires parce qu’aujourd’hui, je peux vivre de ma passion vraiment pleinement. D’un côté La Coupole m’apporte du relationnel, du social, car dans le fait d’être un brocanteur en ligne, on ne voit pas tant de monde que ça, on communique, mais c’est différent. Ma passion pour l’histoire contemporaine est pleinement développée à La Coupole. En effet, j’avais pas mal de connaissances donc ça m’a été plus facile de travailler les ateliers et les visites. Le fait de collectionner du matériel militaire me permet d’identifier des objets. Ces deux activités se complètent, mais demandent beaucoup de temps et nécessitent vraiment de la passion.

- Quels conseils peux-tu donner aux futurs étudiants du Master Patrimoine et Musées ?
- Aujourd'hui, il est important de comprendre que la culture et le patrimoine ne sont pas des secteurs très rémunérateurs, malgré les nombreuses années d'études nécessaires. La concurrence est également forte, notamment avec les diplômés de filières comme le BTS Tourisme, qui décrochent des postes dans les musées et offices de tourisme.

Les futurs étudiants doivent savoir que les diplômes et l'expérience scolaire ne garantissent pas un CDI ; ce domaine est avant tout une question de passion. Il faut démontrer son intérêt, se spécialiser rapidement dans un type de patrimoine précis, car chaque secteur exige des connaissances approfondies.

L'expérience professionnelle et la constitution d’un réseau sont également indispensables. Participer aux vernissages et établir des contacts avec des personnes influentes dans le domaine sont autant de stratégies pour réussir.